Gaza, Rafah, ce n'est encore pas assez pour Netanyahou, qui s'empare d'un morceau stratégique de l'Egypte, au mépris du droit international et des accords de paix, plus que jamais bafoués par le sionisme.
Tensions entre Le Caire et Tel-Aviv
après la prise du couloir de Philadelphie par Israël
Publié le : 30/05/2024 - 14:47 Modifié le : 30/05/2024 - 14:51
Alors que l'armée israélienne poursuit son offensive Gaza, les tensions s'accroissent entre Le Caire et Tel-Aviv, depuis que l’armée israélienne a annoncé mercredi 29 mai avoir occupé le corridor de Philadelphie, une zone démilitarisée le long de la frontière entre l'Égypte et Gaza, selon le traité de paix.
Les autorités égyptiennes ont protesté à plusieurs reprises depuis l’incursion des blindés israéliens dans le corridor de Philadelphie, dont l'armée de l'État hébreu a annoncé avoir pris le contrôle mercredi 29 mai. Une zone tampon de 14 kilomètres de long à l'intérieur de la bande de Gaza, qui borde la frontière égyptienne, mais qui est démilitarisée conformément au traité de paix. L’Égypte accuse Israël de jouer avec le feu en procédant à cette violation des accords et a déclaré se réserver « le droit de prendre toutes les mesures nécessaires pour sauvegarder la sécurité de son territoire ».
Un responsable égyptien a démenti les déclarations israéliennes selon lesquelles des tunnels partent de Gaza et finissent en Égypte. « Le couloir de Philadelphie servait de tuyau d'oxygène au Hamas, par lequel il faisait transiter régulièrement des armes vers la bande de Gaza », avait en effet déclaré le porte-parole de l'armée israélienne, le contre-amiral Daniel Hagari, mercredi.
« Il s’agit de mensonges visant à masquer l’échec militaire israélien à Rafah et tenter de sortir de la crise politique », a réagi le responsable égyptien, rapporte notre correspondant au Caire, Alexandre Buccianti.
À Pékin pour un forum Chine-pays arabes ce jeudi, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi n'a pas fait de commentaire précisément sur la zone tampon, mais a en outre appelé à empêcher tout déplacement de Gazaouis « par la force ».
Une zone tampon pour empêcher les incursions armées
Une zone tampon de plus de trois kilomètres sépare les premiers bâtiments égyptiens de la bande de Gaza. Ce corridor a été mis en place après les accords de camp David signés par l’Égypte et Israël, en septembre 1978, pour empêcher toute incursion armée, contrôler les déplacements des Palestiniens, afin d'assurer la sécurité de ce territoire frontalier, pour l’Égypte et Israël qui craignent des incursions, de la contrebande ou du trafic d'armes entre le Sinaï égyptien et la bande de Gaza.
Le couloir de Philadelphie est un chemin de patrouille que l'armée israélienne s'était taillé le long de la frontière avec l’Égypte, avant le retrait israélien unilatéral de ce territoire palestinien en 2005, après 38 années d'occupation. L'établissement du couloir de Philadelphie a nécessité plusieurs démolitions d'habitations, accentuant davantage la coupure de Rafah en deux parties : l'une égyptienne, l'autre palestinienne, suscitant des critiques de la communauté internationale.
Quant à l'appellation « couloir de Philadelphie », il s'agirait d'un nom de code employé par l'armée israélienne, sans lien avec la ville américaine. Les Égyptiens comme les Palestiniens l'appellent également « couloir de Saladin ».
« C’était un objectif de guerre du gouvernement israélien »
Aujourd'hui, le Caire et Israël se renvoient par ailleurs la responsabilité du blocage de l'acheminement de l'aide humanitaire par le poste-frontière de Rafah, seul point de passage entre le territoire palestinien et l’Égypte, depuis que l'armée israélienne en a pris le contrôle, côté palestinien, au début du mois de mai.
Cette prise du couloir de Philadelphie pourrait donc avoir des conséquences pour la suite de l'offensive israélienne sur le Sud, mais aussi sur le plan diplomatique, selon David Rigoulet-Roze, spécialiste des relations internationales et du Moyen-Orient.
« Dans le cadre de son opération sur Rafah, c’est évidemment essentiel pour rendre étanche cette frontière. Le contrôle de cette bande territoriale permet une supervision et un isolement des supposés derniers bataillons du Hamas – il y aurait deux bataillons encore opérationnels autour de Rafah – pour les empêcher, pour les contenir et les contraindre en terme territorial, resserrer l'étau sur les activistes du Hamas », raconte l'expert au micro de Marin Paulay du service internationale de RFI.
« Là, il y a eu l’annonce d’une découverte d’une vingtaine de tunnels, dont l’un qui mesurerait 1,5 kilomètre et qui serait très proche de la frontière égyptienne, à moins de 50 mètres. Alors, il y a eu des hypothèses qui ont été évoquées en disant que, puisqu’il y a eu la découverte de missiles antichars, d’explosifs, le Hamas aurait entreposé à cet endroit pour éviter des frappes qui auraient pu déborder sur l’Égypte et constituer un problème entre l’Égypte et Israël. Mais c’était un objectif de guerre du gouvernement israélien », analyse David Rigoulet-Roze.
https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20240530-la-tension-monte-entre-l-%C3%A9gypte-et-isra%C3%ABl-apr%C3%A8s-la-prise-du-couloir-de-philadelphie-au-sud-de-gaza
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